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Case report

Hémorragie digestive basse aigüe révélant un mélanome anorectal: à propos d´un cas

Hémorragie digestive basse aigüe révélant un mélanome anorectal: à propos d'un cas

Acute lower gastrointestinal (GI) bleeding revealing anorectal melanoma: a case report

Siham Belhorma1,&, Achraf Miry2, Ouiam Elmqaddem1, Abdelkrim Zazour1, Hajar Koulali1, Zahi Ismaili1, Ghizlane Kharrasse1

 

1Service d'Hépato-gastro-entérologie, Faculté de Médecine et de Pharmacie de Oujda, CHU Mohammed VI, Oujda, Maroc, 2Service d'Anatomie Pathologie, CHU Mohammed VI, Oujda, Maroc

 

 

&Auteur correspondant
Siham Belhorma, Service d'Hépato-gastro-entérologie, Faculté de Médecine et de Pharmacie de Oujda, CHU Mohammed VI, Oujda, Maroc

 

 

Résumé

Le mélanome anorectal est une tumeur rare, représentant moins de 1% des cancers anorectaux et 0,3% des mélanomes malins, c'est une pathologie de mauvais pronostic. Nous rapportons le cas d'un homme âgé de 49 ans vu aux urgences il y a environ 2 mois pour rectorragie aigüe de grande abondance, l'examen macroscopique a révélé une tumeur ulcéro-bourgeonnante, le diagnostic a pu être posé grâce à l'étude histologique complétée par une étude immunohistochimique, la tumeur était métastatique au moment du diagnostic en évolution rapidement progressive imposant un traitement palliatif d'où l'intérêt d'un diagnostic précoce.


Anorectal melanoma is a rare tumor, accounting for less than 1% of anorectal cancers and 0.3% of malignant melanomas. This disease has a poor prognosis. We report the case of a 49-year-old man presenting to the Emergency Department with acute, profuse rectal bleeding, approximately 2 months ago. Macroscopic examination revealed ulcerating cancer. Diagnosis was based on histological examination and immunohistochemistry. Distant metastases had already appeared at the time of diagnosis. This was a rapidly progressing tumor requiring palliative treatment, hence the importance of early diagnosis.

Key words: Anorectal melanoma, acute rectal bleeding, immunohistochemistry, treatment, case report

 

 

Introduction    Down

Le mélanome anorectal est une tumeur rare, représentant moins de 1% des cancers anorectaux et 0,3% des mélanomes malins [1], cette localisation se caractérise par sa rareté ainsi que son pronostic sombre, le taux de survie à 5 ans étant inférieur à 20% [1,2] d'où l'intérêt d'un diagnostic précoce, à travers une observation clinique et une revue de la littérature nous discutons les particularités cliniques, thérapeutiques de cette pathologie rare.

 

 

Patient et observation Up    Down

Information de la patiente: un homme de 49 ans, sans profession, sans antécédents pathologiques notables, qui présentait des rectorragies d'installation brutale de grande abondance évoluant depuis 3 mois sans trouble du transit ni syndrome rectal, évoluant dans un contexte d'altération récente d'état général.

Résultats cliniques: l'examen clinique a objectivé au toucher rectal la présence d'un processus tumoral à 2 cm de la marge anale.

Démarche diagnostique: l'examen proctologique était complété par la rectosigmoïdoscopie qui avait trouvé dès la marge anal une tumeur ulcéro-bourgeonnante franchissable étendu sur 4 cm, l'examen anatomopathologique avait conclu à un mélanome anorectal avec à l'immuno-histochimie une réaction positive à la protéine S 100 (Figure 1), Melan A (Figure 2), le béta-hydroxy-béta-méthylbutyrate (HMB) 45 (Figure 3) et sox-10 (Figure 4), le scanner thoraco-abdomino-pelvien a conclu à un processus du bas rectum métastatique au niveau hépatique, le bilan biologique a objectivé une anémie hypochrome microcytaire a 8,9 g/dl et un légère syndrome inflammatoire, le dosage des marqueurs tumoraux a été demandé mais non fait (non disponibilité), la recherche clinique d'un mélanome cutané associé était négative.

Intervention thérapeutique et suivi: l'évolution a été rapidement progressive avec une altération profonde de l'état général, le malade a été adressé en soins palliatifs et décédé 1 mois après le diagnostic.

Consentement du patient: le consentement éclairé du patient a été obtenu pour la publication.

 

 

Discussion Up    Down

Le mélanome anorectal est une affection rare (1 à 3% de tous les mélanomes) et moins de 1% des cancers anorectaux [1], cette localisation est le plus souvent secondaire a une infiltration de la muqueuse rectale par un processus a point de départ anal à partir des mélanocytes normalement présents dans l'épithélium malpighien de la zone pectinée et dans l'épithélium transitionnel au-dessus de la ligne pectinée [3], la maladie est plus fréquente chez les sujets âgés avec un pic de fréquence entre la 6e et la 7e décade, avec une légère prédominance féminine [4], ce qui est spécifique dans notre cas est la survenue de la maladie a un âge plus jeune chez un sexe masculin, sur le plan étiopthogénique, l'hypothèse d'une irritation chronique reste la plus probable vue l'exclusion de l'exposition solaire dans cette localisation [5] la symptomatologie clinique est non spécifique, dominée par les rectorragies chroniques ou parfois aigües comme c'était le cas de notre patient, la masse anale et le syndrome rectal, avec altération d'état général en cas de métastase et un syndrome anémique en cas d'anémie mal toléré [5], l'examen clinique ne révèle pas d'autres localisations synchrones (peau, œil), l'examen proctologique révèle la présence d'une tumeur ulcéro-bourgeonnante ou une lésion polypoïde et pédiculée, la couleur noirâtre caractéristique du mélanome est présente dans un tiers des cas [5] ce qui n'était pas le cas chez notre patient, la confirmation histologique du diagnostic du mélanome anorectal est identique à celui des mélanomes d'autres localisations, se fait par la mise en évidence du pigment mélanique au sein de la tumeur par la coloration classique de Fontana [6], le recours à l'immunohistochimie peut s'avérer nécessaire dans les formes achromiques, en utilisant l'anticorps antiprotéine S100 et l'anticorps anti-HMB45 plus spécifique des mélanomes [5], chez notre cas la réaction était positive à la protéine S 100 (Figure 1), Melan A (Figure 2), l'HMB 45 (Figure 3) et sox-10 (Figure 4).

Les moyens thérapeutiques sont représentés essentiellement par la chirurgie réalisant le plus souvent une amputation abdomino-périnéale avec curage ganglionnaire inguinal et pelvien, qui semble être un facteur pronostique majeur influençant la survie [7], ou une exérèse localisée de la tumeur, le recours à l'une des méthodes reste toujours un sujet de controverse. Cependant, des études récentes montrent qu'une exérèse tumorale épargnant le sphincter associé à une radiothérapie à faible dose semble atteindre un contrôle local similaire à une résection abdomino-pelvienne [8]. Un traitement endoscopique par résection muqueuse ou dissection sous muqueuse a été récemment proposé comme alternative thérapeutique à la chirurgie dans les formes localisées [9], le traitement chirurgical s'impose dans le cas d'un diagnostic précoce ce qui n'était pas le cas chez notre patient. Les études ont montré également que la radiothérapie présente un bénéfice majeur dans les cas palliatifs et son association à l'exérèse locale permet un contrôle lésionnel local similaire à l'amputation abdomino-périnéale [10].

 

 

Conclusion Up    Down

Les mélanomes anorectaux restent des tumeurs rares dont le diagnostic se fait à un stade tardif, leur pronostic est souvent sombre vu l'évolution métastatique.

 

 

Conflits d'intérêts Up    Down

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d'intérêts.

 

 

Contributions des auteurs Up    Down

Tous les auteurs ont contribué à ce travail. Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale du manuscrit.

 

 

Figures Up    Down

Figure 1: réaction positive à la protéine S 100

Figure 2: réaction positive au Melan A

Figure 3: réaction positive au béta-hydroxy-béta-méthylbutyrate 45

Figure 4: réaction positive au sox-10

 

 

Références Up    Down

  1. Baniyaseen KA, Saeed M, Albonni AO, Abdulshakour BM, Dairi G, Al-Allaf FA, et al. Primary Anorectal Amelanotic Melanoma: The First Case Report from Saudi Arabia. Middle East J Dig Dis. 2019 Jul;11(3):166-173. PubMed | Google Scholar

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