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Case report

Le syndrome de Miller-Fisher au cours d´une pneumonie virale à coronavirus (HCov)

Le syndrome de Miller-Fisher au cours d´une pneumonie virale à coronavirus (HCov)

Miller-Fisher syndrome in patients with viral pneumonia caused by Coronavirus (HCov)

Anass Elbouti1,&, Amine Belghiti1, Walid Atamani1, Naoufal Doghmi1, Hicham Bakali1

 

1Pôle d´Anesthésie Réanimation, Hôpital Militaire d´Instruction Mohamed V, Rabat, Maroc

 

 

&Auteur correspondant
Anass Elbouti, Pôle d´Anesthésie Réanimation, Hôpital Militaire d´Instruction Mohamed V, Rabat, Maroc

 

 

Résumé

Le syndrome de Miller-Fisher représente une entité rare, touchant les nerfs crâniens, du syndrome de Guillain-Barré, qui ne survient que chez 5% des cas chez l´adulte, il est caractérisé par l´association d´une ophtalmoplégie, d´une ataxie et d´une aréflexie ostéo-tendineuse. Nous rapportons le cas d´un patient âgé de 41 ans, admis aux urgences pour paresthésie des 4 membres, ataxie, troubles visuels et de déglutition, et ce au décours d´un syndrome grippal. L´imagerie par résonnance magnétique était sans anomalie. L´étude du liquide céphalo-rachidien montrait une normo-glucorachie, normo-protéinorachie avec absence de cellules et la culture était stérile. La recherche des infections respiratoires par biologie moléculaire (PCR) a permis d´identifier une pneumonie à coronavirus. L´examen électromyogramme (EMG) était en faveur d´une PRN type Miller-Fisher. L´évolution était favorable après immunothérapie (cure de 05 jours), traitement symptomatique et surveillance en réanimation.


Miller-Fisher syndrome represents a rare entity, affecting the cranial nerves, of Guillain-Barré syndrome, which occurs only in 5% of adults cases, it is characterized by the association of ophthalmoplegia, ataxia and osteotendinous arteflexia. We report the case of a 41 year old patient; admitted to the emergency department for peripheric paresthesia, ataxia, visual and swallowing disorders and this following an influenza-like illness. The magnetic resonance imaging was without abnormality. The study of the cerebrospinal fluid showed a normal glucorachia and proteinorachia, absence of cells and a sterile culture. Molecular biology research for respiratory infections has identified coronavirus pneumonia. The electromyogram examination (EMG) was in favor of a Miller Fisher-type polyradiculoneuritis. The evolution was favorable after immunotherapy (5 days cure), symptomatic treatment and intensive care surveillance.

Key words: Miller-Fisher, Coronavirus (HCov), immunothérapy, case report

 

 

Introduction    Down

Le syndrome de Miller-Fisher est une variante, touchant les nerfs crâniens, du syndrome de Guillain-Barré, décrit pour la première fois par Fisher en 1956, le diagnostic est clinique basé sur la triade classique; ophtalmoplégie, ataxie et aréflexie ostéo-tendineuse. Il est le plus souvent précédé d´une infection virale respiratoire ou gastro-intestinale. Nous rapportons un cas de syndrome de Miller-Fisher au cours d´une pneumonie virale à coronavirus.

 

 

Patient et observation Up    Down

Nous présentons le cas d´un patient âgé de 41 ans, admis aux urgences pour syndrome cérébelleux avec troubles visuels et de déglutition, son seul antécédent pathologique était une tuberculose pulmonaire diagnostiquée à l´âge de 15 ans, traité et déclaré guéri, son histoire remonte a une semaine avant son admission par l´installation d´une fièvre non chiffré avec myalgies, céphalées, toux sèche dans un contexte d´asthénie généralisée et d´anorexie. L´évolution était marquée par l´installation rapidement progressive des paresthésies des deux membres inferieurs ascendantes avec troubles visuels et de déglutition. L´examen à l´admission aux urgences trouvait un patient conscient, orienté, fébrile à 39°C, déshydraté, tachycarde à 100 bpm, pression artérielle à 140/85, légèrement polypnéique avec SpO2: 90% à l´air ambiant. L´examen neurologique trouva un syndrome cérébelleux statique et cinétique avec une ataxie à la marche, un élargissement du polygone de sustentation à la station debout et un trouble de la coordination avec une dysmétrie à la manœuvre doitnez et talon- genou; les réflexes ostéo tendineux étaient abolis aux quatre membres avec reflexe cutanéo-plantaire indifférent, l´examen des paires crâniennes trouvait une atteinte de la troisième paire crânienne avec diplopie binoculaire verticale et un ptosis sans atteinte du contingent intrinsèque. Par ailleurs, le tonus, la force musculaire et la sensibilité étaient conservées aux quatre membres.

 

Le bilan biologique a montré une hyperleucocytose à 15300/mm2, CRP à 6,95 mg/l et une procalcitonine négative avec fonction rénale correcte, bilan thyroïdien normal et absence de troubles hydro-électrolytiques. L´imagerie par résonnance magnétique (IRM) cérébrale était sans anomalie, l´analyse du liquide céphalo-rachidien montrait une normoglucorachie, normo-protéinorachie avec absence de cellules et la culture était stérile, la recherche des infections respiratoires par biologie moléculaire a identifié un coronavirus (HCoV), l´examen électromyogramme (EMG) identifia; des vitesses de conductions sensitives légèrement diminuées avec des amplitudes des potentiels d´action sensitives effondrées et des vitesses de conduction motrices sans anomalies; l´aspect EMG était en faveur d´une polyradiculonévrite type Miller-Fisher. L´évolution était favorable, régression des paresthésies et disparition des troubles visuels; après une première cure d´immunoglobuline (0,4g/kg/jr pendant 05 jours), traitement symptomatique et surveillance au service de réanimation médicale.

 

 

Discussion Up    Down

Le syndrome de Miller-Fisher (SMF) est une entité rare, touchant les nerfs crâniens, du syndrome de Guillain-Barré, son incidence en Europe est de l´ordre de 0,04 à 0,18/100 000 habitants [1], représentant 5 à 10% des cas du syndrome de Guillain-Barré (SGB) de l'adulte, alors que les cas pédiatriques sont encore plus rares [2]. Ce syndrome est le plus souvent précédé d´une infection virale respiratoire ou gastro-intestinal bien que le mécanisme physiopathologique ne soit pas encore élucidé [3], dans notre cas, le SMF était associé à une infection à coronavirus (HCoV). En effet, ces virus sont des pathogènes des voies respiratoires supérieures et qui adoptent un comportement opportuniste et peuvent infecter les voies aériennes inferieures; principalement chez les nouveau-nés, les jeunes enfants, les personnes âgées et les individus immunodéprimés [4]. Cependant, ces coronavirus ne sont pas confinés qu´aux voies respiratoires. Ils peuvent atteindre le SNC par voie hématogène ou via des nerfs connectant les voies respiratoires à l´encéphale [4,5], comme le nerf olfactif [4]. Ces faits suggèrent que les coronavirus humains pourraient être associés au déclenchement ou à l´exacerbation de certaines maladies neurologiques humaines dont le mécanisme reste encore mal connu [5]. Toutefois, dans la littérature, aucun cas de SMF associé à une infection à coronavirus n´a été rapporté, notre cas serait le premier.

 

Sur le plan clinique, le syndrome de Miller-Fisher est caractérisé par la triade classique; ophtalmoloplégie, ataxie et aréflexie ostéo-tendineuse, l´épisode infectieux précédant l´atteinte neurologique de 08 jours [3, 6] et les troublent oculomoteurs extrinsèques se présentent le plus souvent comme les premiers symptômes. L´atteinte d´autres paires crâniennes est fréquemment associée à la triade clinique définissant le SMF; notamment le nerf facial [3], du glosso-pharyngé ou du nerf vague responsable de trouble de déglutition ou d´une dysphonie [7]. L´IRM cérébrale est habituellement normale dans le SMF, l´analyse du liquide céphalo-rachidien se caractérise par une hyperprotéinorachie dans environ 2/3 des cas [7], la présence dans le sang d´Anticorps anti GQ1b est quasi constant (95% des cas) [8], bien que ces anticorps ne sont pas spécifiques du SMF car ils ont également été retrouvé chez les patients atteints du SGB et de l´encephalite de Bickerstaff [9], l´électromyogramme (EMG) peut orienter le diagnostic en identifiant une baisse des amplitudes des potentiels d´action sensitifs avec des vitesses de conductions sensitives normales ou légèrement diminués et des vitesses de conductions motrices sans anomalies [10]. Neanmoins, la normalité des examens complementaires n´exclut pas le SMF si le tableau clinique est classique. Sur le plan thérapeutique, le SMF nécessite une prise en charge rapide par l´administration d´immunoglobulines polyvalentes en intraveineux dans un service de réanimation [10] avec traitement symptomatique et surveillance des fonctions vitales notamment respiratoire.

 

 

Conclusion Up    Down

L´évolution est souvent favorable avec une régression spontanée des troubles, l´évolution vers une insuffisance respiratoire est exceptionnelle rapportée surtout chez des patients ayant un SMF associé à d'autres formes du Syndrome de Guillain-Barré [11].

 

 

Conflits d'intérêts Up    Down

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d´intérêts.

 

 

Contributions des auteurs Up    Down

Tous les auteurs ont contribué à l´élaboration de ce travail. Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale du manuscrit.

 

 

Références Up    Down

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