Leishmaniose viscérale à L. major découverte sur une biopsie d´un ganglion cervical: à propos d´un cas
Mamadou Wade, Abdou Magib Gaye, Amy Thiam, Papa Issa Dione, Khadidiatou Dansokho, Sokhna Aïssatou Touré, Ibou Thiam, Marie Joseph Diémé-Ahouidi, Chérif Mouhamed Moustapha Dial
Corresponding author: Mamadou Wade, Laboratoire d´Anatomie et Cytologie Pathologiques, Centre Hospitalier Universitaire de Fann, Dakar, Sénégal
Received: 05 Mar 2025 - Accepted: 09 Jun 2025 - Published: 08 Jul 2025
Domain: Laboratory medicine,Laboratory medicine
Keywords: Leishmaniose, L. major, Sénégal, rapport de cas
Funding: Ce travail n'a reçu aucune subvention spécifique d'un organisme de financement des secteurs public, commercial ou à but non lucratif.
©Mamadou Wade et al. PAMJ Clinical Medicine (ISSN: 2707-2797). This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution International 4.0 License (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.
Cite this article: Mamadou Wade et al. Leishmaniose viscérale à L. major découverte sur une biopsie d´un ganglion cervical: à propos d´un cas. PAMJ Clinical Medicine. 2025;18:8. [doi: 10.11604/pamj-cm.2025.18.8.47138]
Available online at: https://www.clinical-medicine.panafrican-med-journal.com//content/article/18/8/full
Case report 
Leishmaniose viscérale à L. major découverte sur une biopsie d´un ganglion cervical: à propos d´un cas
Leishmaniose viscérale à L. major découverte sur une biopsie d'un ganglion cervical: à propos d'un cas
Visceral Leishmaniasis due to L. major identified in a cervical lymph node biopsy: a case report
Mamadou Wade1,&, Abdou Magib Gaye2, Amy Thiam3, Papa Issa Dione1, Khadidiatou Dansokho4,
Sokhna Aïssatou Touré2, Ibou Thiam3, Marie Joseph Diémé-Ahouidi1,
Chérif Mouhamed Moustapha Dial4
&Auteur correspondant
La leishmaniose à L. major est endémique au Sénégal où cette espèce est transmise à l'homme par des rongeurs. Nous rapportons un cas de Leishmaniose viscérale à L. major chez un homme de 35 ans habitant au centre du Sénégal. Le patient présentait à la clinique une fièvre, une pâleur des muqueuses, des polyadénopathies et une hépatomégalie. A la biologie, la numération formule sanguine mettait en évidence une hyperleucocytose, une thrombocytose et une anémie. Le frottis sanguin montre une myélémie équilibrée avec des blastes à 9% et le myélogramme présente une hyperplasie granuleuse compatible avec un syndrome myéloprolifératif. L'examen histologique d'une biopsie de ganglion cervical mettait en évidence des amastigotes de leishmanies dans le cytoplasme des histiocytes. La polymerase chain reaction (PCR) réalisée sur des substrats ganglionnaires et médullaires identifiait l'espèce responsable, L. major. Le patient est décédé avant l'établissement du diagnostic final. La leishmaniose viscérale est mortelle en l'absence de traitement. L'anatomie pathologique peut contribuer à l'établissement du diagnostic complété par la biologie moléculaire pour l'identification de l'espèce.
Leishmaniasis caused by L. major is endemic in Senegal, where this species is transmitted to humans by rodents. We here report a case of visceral leishmaniasis caused to L. major in a 35-year-old man living in central Senegal. The patient presented at the clinic with fever, pale mucous membranes, polyadenopathy and hepatomegaly. Laboratory tests revealed leukocytosis, thrombocytosis and anaemia. Blood smear showed a balanced presence of circulating myeloid precursor cells, with 9% blasts, and myelogram showed granulocytic hyperplasia consistent with a myeloproliferative syndrome. Histological examination of a cervical lymph node biopsy revealed Leishmania amastigotes within the cytoplasm of histiocytes. PCR analysis performed on lymph node and bone marrow substrates identified the species responsible as L. major. Unfortunately, the patient died before the final diagnosis was established. Visceral leishmaniasis is fatal if left untreated. Histopathology can aid in establishing the diagnosis, which can be further confirmed by molecular biology techniques for species identification.
Key words: Leishmaniasis, L. major, Senegal
La leishmaniose est une maladie parasitaire causée par un protozoaire flagellé du genre Leishmania. Elle est transmise par la piqûre de phlébotomes femelles infectés. Selon l'espèce parasitaire en cause et les mécanismes de défense mis en place par l'hôte, la maladie peut prendre la forme d'une affection cutanée, cutanéo-muqueuse ou viscérale, mortelle en l'absence de traitement [1]. Deux espèces de Leishmania impliquées dans la leishmaniose viscérale humaine se trouvent en Afrique de l'Ouest: Leishmania donovani, qui est anthroponotique [2] et Leishmania infantum, observée principalement chez les chiens [3]. Le Sénégal est un exemple du cycle parasitaire de L. major en Afrique de l'Ouest, où cette espèce est transmise des rongeurs à l'homme, dans les zones rurales sèches [4]. Nous rapportons une observation sénégalaise de Leishmaniose viscérale à L. major chez un adulte à point de départ cutané.
Information du patient: il s'agit d'un homme de 35 ans, originaire de Touba (centre du Sénégal), agriculteur de profession qui consultait pour prurit suivi de polyadénopathies associés à un amaigrissement de 8 kg, une fièvre, une dysphonie, une dysphagie et des difficultés respiratoires. Cette symptomatologie évoluerait depuis un mois selon le patient.
Résultats cliniques: l'examen physique objectivait une altération de l'état général, des nodules sous cutanés au niveau des bras, une pâleur des muqueuses et des macropolyadénopathies intéressant toutes les aires ganglionnaires superficielles, bilatérales, fermes, avec peau en regard saine. L'examen de l'abdomen mettait en évidence une hépatomégalie, ferme, indolore à bord inférieur mousse, à surface antérieure lisse sans splénomégalie associée. L'examen de la sphère oto-rhino-laryngologique (ORL) objectivait une hypertrophie des amygdales palatines.
Démarche diagnostique: à la biologie, la numération formule sanguine montrait une hyperleucocytose à 159500/Ul, une thrombocytose à 1722000/Ul et une anémie à 8,2 g/dl. Le frottis sanguin montrait une myélémie équilibrée avec des blastes à 9% et le myéologramme trouvait une hyperplasie granuleuse compatible avec un syndrome myéloprolifératif. La sérologie rétrovirale était négative. La radiographie du thorax mettait en évidence des adénopathies médiastinales et un syndrome interstitiel. L'échographie abdominale trouvait une hépatomégalie homogène et des magmas d'adénopathies profondes, cœlio-mésentériques et pelviennes non nécrotiques. Devant ce tableau, l'hypothèse d'un syndrome myéloprolifératif a été évoquée.
Intervention thérapeutique et suivi: un traitement à base d'allopurinol 300 mg (1cp/jr), paracétamol 1g (1cp x 3/jr), d'hydroxycarbamide 500 mg (2cp x 2/jr) et d'hémisuccinate de méthylprednisolone 120 mg (1 inj/j), a été instauré. Devant le ramollissement secondaire des adénopathies, une biopsie exérèse d'un ganglion cervical a été réalisée. L'examen histologique à la coloration standard hématoxyline éosine (HE) montrait des histiocytes contenant des amastigotes de leishmanies dans leur cytoplasme (Figure 1). Une coloration au Giemsa confirmait la présence des amastigotes (Figure 2).
A l'immunohistochimie, on observait, un marquage diffus de l'anticorps anti-CD68 (Figure 3), une négativité du CD1a, une positivité focale du CD3 et du CD20. L'examen parasitologique avec la technique d'amplification génomique pratiquée sur des substrats ganglionnaire et médullaire identifiait l'espèce responsable, L. major.
L'état stationnaire de sa symptomatologie et le défaut de moyens, avant l'établissement du diagnostic final, a motivé le patient à demander un contre-avis médical pour rentrer à Touba. Il nous a été informé de son décès par sa famille 10 jours après.
Consentement du patient: le patient est décédé avant l'établissement du diagnostic. Le consentement éclairé a été obtenu de la part de la conjointe pour que nous utilisions le cas.
La leishmaniose est une affection qui touche l'Afrique subsaharienne. Cependant, il existe un important manque de recherche consenti à l'épidémiologie de la maladie dans cette région du monde [4]. La leishmaniose cutanée (LC) à L. major est endémique au Sénégal. Sur une série d'un auteur sénégalais, la maladie touchait l'adulte jeune avec une prédominance du sexe masculin [5]. La leishmaniose cutanée (LC) ulcéro-crouteuse est la forme clinique la plus fréquente au Sénégal mais des formes pseudo-lépromateuse ou pseudo-tumorale ont été décrites [5]. Les nodules sous-cutanés objectivés au niveau des 2 bras devraient motiver le clinicien à faire un examen dermatologique plus minutieux à la recherche d'autres lésions associées. Cependant, il important de constater que la présentation clinique du patient est assez atypique et fait penser sans doute, en premier lieu, à une pathologie hématologique, entrainant ainsi un retard diagnostic, ce qui est le cas chez notre patient. Chez notre malade, la LC pourrait en effet être primitive avec localisations secondaires ganglionnaire et médullaire.
La triade clinique habituellement rencontrée dans la leishmaniose viscérale comprend une fièvre irrégulière, une altération de l'état général et une splénomégalie. A ces signes s'associent le plus souvent une pâleur témoignant l'anémie et une hépatomégalie. L'absence de splénomégalie chez notre malade n'est pas habituelle de la leishmaniose viscérale puisqu'elle est retrouvée dans plus de 80% des cas de la leishmaniose viscérale (LV) [6]. A ces anomalies cliniques s'associe une cytopénie pouvant toucher les trois lignées associant une anémie, neutropénie et thrombopénie [7]. Ce tableau clinique aspécifique peut être facilement confondue avec une hémopathie ou une connectivité. Chez notre malade, il est noté seulement une anémie à 8,2 g/dl. La thrombocytose et l'hyperleucocytose démontrent à quel point les signes de la maladie sont non spécifiques.
L'immunodépression induit par l'infection VIH est la cause la plus fréquente d'une viscéralisation d'une leishmaniose cutanée. D'autres causes d'immunodépression sont associées aux leishmanioses viscérales en particulier les traitements par anti-TNF, cyclophosphamide, méthotrexate, corticoïdes et les greffes d'organes solides. La malnutrition est aussi un facteur prédisposant [8]. La mise sous corticoïdes et le traitement anti-tumoral pourrait fragiliser l'immunité de notre malade et être probablement la cause de la viscéralisation de l'espèce. Par contre, plusieurs études ont démontré la pathogénie des espèces de leishmania, indiquant que L. major a une faible capacité à devenir viscérotrope [7]. Chez notre patient, la sérologie rétrovirale était négative. Le diagnostic formel de LV repose sur la mise en évidence du parasite dans un prélèvement pathologique. Classiquement la recherche du parasite nécessite un prélèvement de moelle osseuse (MO) réalisé par ponction sternale chez l'adulte et par ponction de la crête iliaque chez l'enfant. Cependant, il n'est pas rare de poser le diagnostic sur une ponction ganglionnaire à l'aiguille fine ou une biopsie ganglionnaire qui mettent en évidence les formes amastigotes, typiquement au sein de cellules phagocytaires. Le diagnostic moléculaire est un excellent outil du diagnostic et du suivi des leishmanioses. La PCR détecte des parasitémies inférieures à un parasite par microlitre avec une sensibilité proche de 100% sur un prélèvement médullaire [9].
Concernant le traitement de la LV, l'amphotéricine B a montré une excellente efficacité avec des taux de succès dépassant 95% chez l'immunocompétent pour des posologies totales de 10 à 20mg/kg [10]. A l'absence de traitement l'évolution se fait vers la mort, ce qui est le cas chez notre malade.
La leishmaniose viscérale est une maladie mortelle à l'absence de traitement. Le pathologiste peut jouer un rôle dans l'établissement du diagnostic sur des prélèvements tissulaires ou cytologiques. Cependant, ce diagnostic doit être compléter par la biologie moléculaire pour l'identification de l'espèce.
Les auteurs ne déclarent aucun conflit d'intérêts.
Mamadou Wade et Abdou Magib Gaye ont écrit l'article. Amy Thiam et Sokhna Aïssatou Touré nous ont communiqué le dossier du malade. Les autres auteurs ont révisé l'article et ont apporté des modifications et des recommandations. Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale de ce manuscrit.
Figure 1: présence d'amastigotes de leishmanie dans le cytoplasme des histiocytes (HE à l'immersion)
Figure 2: présence des amastigotes de leishmanie dans le cytoplasme des histiocytes (Giemsa x 400)
Figure 3: immunohistochimie montrant une positivité diffuse de l'anticorps anti-CD68 au grossissement 100x
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