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Case report

Dysplasie thanatophore diagnostiquée en échographie anténatale : à propos d´un cas

Dysplasie thanatophore diagnostiquée en échographie anténatale : à propos d´un cas

Thanatophoric dysplasia diagnosed by antenatal ultrasound scan: about a case

Pihou Gbande1,&, Mazamaesso Tchaou1, Mamadou Lamarana Diallo1, Patapaki Wangala2, Komlanvi Adjenou3

 

1Service de Radiologie et Imagerie Médicale, Centre Hospitalier Régional de Sokodé, Sokodé, Togo, 2Service de Gynéco-obstétrique, Centre Hospitalier Régional de Sokodé, Sokodé, Togo, 3Service de Radiologie, Centre Hospitalier Universitaire du Campus, Lomé, Togo

 

 

&Auteur correspondant
Pihou Gbande, Service de Radiologie et Imagerie Médicale, Centre Hospitalier Régional de Sokodé, Sokodé, Togo

 

 

Résumé

La dysplasie thanatophore est une dysplasie osseuse létale rare. Elle est causée par une mutation du gène FGFR3 (Fibroblast growth factor receptor 3), localisé sur le bras court du chromosome 4. Il existe deux sous-types qui se ressemblent beaucoup dans leur caractéristiques cliniques mais ont cependant des caractéristiques radiologiques et mutations génétiques distinctes. Le diagnostic précoce est impératif et est basé sur les données de l´échographie anténatale. Nous rapportons un cas de dysplasie thanatophore de type I, diagnostiquée à 26 SA par une échographie anténatale de routine chez une femme âgée de 34 ans sans antécédent malformatif familial connu. Les éléments échographiques qui ont orienté le diagnostic sont : une étroitesse de la cavité thoracique, un aspect raccourcit des os des membres avec un aspect incurvé des fémurs et un rapport BIP/LF de 3,8. Une interruption médicale de la grossesse a été faite sur décision du couple après information éclairée sur la pathologie fœtale. Une photo du fœtus et une radiographie corps entier post-mortem ont été réalisées et ont confirmé le diagnostic de DT de type I. Vue la rareté de cette affection, nous proposons à travers ce cas rappeler les aspects diagnostiques de cette anomalie fœtale.


Thanatophoric dysplasia is a rare lethal bone dysplasia. It is caused by a mutation in the FGFR3 gene (Fibroblast growth factor receptor 3), on the short arm of chromosome 4. It is categorized into two subtypes that share very similar clinical features but, nevertheless, have distinct radiological characteristics and genetic mutations. Early diagnosis is essential and is based on antenatal ultrasound scan. We here report a case of Type I thanatophoric dysplasia detected in a 34-year old woman at 26 weeks pregnant with no known family history of malformations. Diagnosis was based on routine antenatal ultrasound scan. Ultrasound findings included: a narrow thoracic cavity, shortened limb bones with bent femurs and a BPD/FL ratio of 3.8. Medical abortion was performed after voluntary and informed consent was obtained from the woman and her partner. A photo of the fetus and whole-body postmortem fetal radiography were performed which confirmed the diagnosis of type I TD. Given the rarity of this condition, the purpose of this study is to highlight the diagnostic features of this fetal abnormality.

Key words: thanatophoric dysplasia, antenatal ultrasound scan, skeletal dysplasia, fetal malformations

 

 

Introduction    Down

La dysplasie thanatophore (DT) ou nanisme thanatophore est la forme la plus courante de dysplasie squelettique néonatale létale [1]. Elle se caractérise par une insuffisance marquée de développement du squelette avec des membres courts. C´est une malformation très rare avec une incidence de 1,68-8,3 pour 100 000 naissances [1]. Elle est causée par une mutation du gène FGFR3 (Fibroblast growth factor receptor 3), localisé sur le bras court du chromosome 4 [2]. Traditionnellement, le diagnostic postnatal de la DT était basé sur anomalies radiographiques du squelette du nouveau-né. La DT est classée en deux types (DT1 et DT2) basé sur la présence ou l'absence d'un crâne en « feuille de trèfle » ou présence de fémurs incurvés/droits. En raison du risque élevé de mortalité postnatale de cette malformation, le diagnostic de DT doit être réalisé en anténatal par une échographie. Nous rapportons un cas de DT diagnostiquée à 26 SA et nous proposons à travers ce cas rappeler les aspects échographiques, cliniques et radiographiques de cette malformation rare.

 

 

Patient et observation Up    Down

Information du patient : il s´agissait de Mme TS, âgée de 34 ans G3P2 (avec deux enfants vivants bien portants) reçue au centre hospitalier régional de Sokodé pour une échographie obstétricale. Il n´y avait pas d´antécédent familial de malformation congénitale connue ni de notion de consanguinité. Elle n´avait jamais réalisé d´échographie pour cette grossesse.

Démarche diagnostique : l´échographie réalisée à 26 SA (Figure 1) a permis de mettre en évidence un fœtus de sexe féminin avec une tête de volume normal (BIP= 64 mm, soit 26 SA), un thorax peu développé, un abdomen de volume normal (CA=229 mm, soit 25 SA) et surtout un raccourcissement des os des quatre membres avec des fémurs qui sont incurvés (LF = 17 mm, soit 15 SA) et avec un rapport BIP/LF =3,8. Il n´y avait pas d´autre anomalie morphologique associée. Le diagnostic de DT de type I a été posé sur ces constatations et le couple a été informé.

Intervention thérapeutique et suivi : une interruption médicale de la grossesse a été faite sur décision du couple après information éclairée sur la pathologie fœtale. Une photo du fœtus et une radiographie corps entier post-mortem ont été réalisées (Figure 2) et ont confirmé le diagnostic de DT de type I.

 

 

Discussion Up    Down

Les dysplasies squelettiques constituent un groupe hétérogène d´anomalie de croissance osseuse entraînant une forme et une taille anormales du squelette. La DT est la plus fréquente des ostéochondrodysplasies létales [1, 3]. Le mot « thanatophore », issu du grec, signifie « porteur de mort ». Cette maladie a en effet un très haut taux de létalité néonatale. C'est-à-dire que le décès survient rapidement après la naissance, généralement par des troubles de la respiration. Des cas atteignant un âge plus avancé voire l´âge adulte existent cependant, mais restent marginaux. La DT a été décrite pour la première fois, en 1967, par Maroteaux et al. [4]. Elle est causée par l'activation du gène FGFR3 situé sur le bras court du chromosome 4 conduisant à une régulation négative de la croissance osseuse [2, 3]. L'activation de FGFR3 dans une majorité est due à des mutations. Le mode de transmission du DT est autosomique dominant mais pratiquement tous les cas de DT surviennent chez des personnes sans antécédents familiaux de DT [5]. Dans notre cas, il n´existait aucune histoire de DT dans la famille. La gestante avait déjà eu deux enfants vivants bien-portants. Il existe deux sous-types qui se ressemblent beaucoup dans leur caractéristiques cliniques mais ont cependant des caractéristiques radiologiques et mutations génétiques distinctes [3, 6]. Dans le type I, l'acide aminé arginine, à la position 248, est substituée par la cystine et dans le type II, la lysine à la position 650 est remplacée par le glutamate dans la plupart des cas. Le type I représente 80% des cas et le type II 20% des cas. Les deux sous-types peuvent être différenciés par la morphologie du crâne et du fémur [7, 8]. Le type I, le plus fréquent est caractérisé par une macrocranie, un fémur court et incurvé donnant la forme de « combiné téléphonique ». Les fœtus atteints de DT de type II ont un crâne en trèfle. La fermeture prématurée des sutures coronales et lambdoïdes est souvent à l´origine de cette déformation du crâne.

Le diagnostic anténatal de la DT est basé sur des arguments échographiques suivants : une cavité thoracique relativement étroite, des os tubulaires courts, épais et courbés, en particulier ceux des membres inférieurs, un épaississement des parties molles des extrémités, une tête relativement grande avec une bosse frontale. Un aspect de crâne en trèfle peut également être observé dans le type II. Le rapport BPD/FL peut probablement être un marqueur utile pour détecter une anomalie aberrante comme la DT même en début de la grossesse [9]. Si un rapport BPD/FL est plus élevé, le développement du squelette fœtal doit être surveillé attentivement. Les éléments qui ont orienté le diagnostic dans notre cas sont : une étroitesse de la cavité thoracique, un aspect raccourcit des os des membres avec un aspect incurvé des fémurs et un rapport BIP/LF de 3,8. Il peut être difficile d'établir un diagnostic précis avant le 3e trimestre (˜22 semaines). Avant cette date, la DT peut être inclus dans le diagnostic différentiel s'il y a une mesure de la longueur du fémur courte. Les radiographies sont généralement réalisées en post-mortem, voire pas du tout. Les anomalies incluent les membres, les os iliaques, le thorax, le crâne, la face et le rachis. Le principal diagnostic différentiel de la DT est l'achondroplasie. Dans l´achondroplasie, le raccourcissement est supérieur à 80% par rapport à la moyenne de l´âge gestationnel alors qu´il atteint 30 à 60% pour la DT. Les deux autres diagnostics différentiels sont : l´ostéogenèse imparfaite (on note la présence de fracture) et l´achondrogenèse (hypominéralisation osseuse). Cependant, la présence d'une tête en « feuille de trèfle » caractéristique, l´aspect incurvé du fémur en « combiné téléphonique » l´étroitesse de la cavité thoracique, responsable d´une mortalité très élevée différencie la DT des autres causes de nanisme micromélique.

 

 

Conclusion Up    Down

La DT est la dysplasie squelettique néonatale létale la plus fréquente. Son diagnostic anténatal précoce par une échographie est impératif car cela aidera les obstétriciens et les parents dans la prise d´une décision concernant l'option d'interruption médicale de grossesse. La présence d'une tête en « feuille de trèfle », l´aspect incurvé du fémur en « combiné téléphonique » l´étroitesse de la cavité thoracique sont les éléments de base du diagnostic et permettent de la différencier des autres causes de nanisme micromélique. Le diagnostic de certitude est par assuré par la biologie moléculaire.

 

 

Conflits d'intérêts Up    Down

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d´intérêts.

 

 

Contributions des auteurs Up    Down

Tous les auteurs ont contribué à ce travail et ont lu et approuvé la version définitive du manuscrit.

 

 

Figures Up    Down

Figure 1 : échographie obstétricale réalisée à 26 SA montrant : un crâne normal (A), un raccourcissement des membres et des fémurs incurvés (B et C) et une étroitesse de la cavité thoracique (C, têtes de flèche)

Figure 2 : photo (A) et radiographie post-mortem du fœtus (B) montrant un aspect caractéristique de dysplasie thanatophore : raccourcissement des os des membres avec un aspect incurvé en « combiné téléphonique » des fémurs

 

 

Références Up    Down

  1. Sawai H, Oka K, Ushioda M, Nishimura G, Omori T, Numabe H et al. National survey of prevalence and prognosis of thanatophoric dysplasia in Japan. Pediatrics International. 2019;61:748-53. PubMed | Google Scholar

  2. Noe EJ, Yoo HW, Kim KN, Lee SY. A case of thanatophoric dysplasia type I with an R248C mutation in the FGFR3 gene. Korean J Pediatr. 2010;53(12):1022-5. PubMed | Google Scholar

  3. Korday CS, Sharma RK, Paradhi S, Malik S. Lethal short limb dwarfism: thanatophoric dysplasia- type I. J Clin Diagn Res. 2014;8(11):PJ1-2. PubMed | Google Scholar

  4. Maroteaux P, Lamy M, Robert JM. Thanatophoric dwarfism. Presse Med. 1967 Nov 22;75(49):2519-24. PubMed

  5. Anjum F, Daha SK, Shah G. Thanatophoric skeletal dysplasia: a case report. J Nepal Med Assoc. 2020;58(223):185-7. Google Scholar

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  7. Tirumalasetti N. Case report of thanatophoric dysplasia: a lethal skeletal dysplasia. J NTR Univ Health Sci. 2013;2(4):275-7. Google Scholar

  8. Sharma M, Jyoti, Jain R, Devendra. Thanatophoric dysplasia: a case report. J Clin Diagn Res. 2015;9(11):QD01-3. PubMed

  9. Wang L, Takai Y, Baba K, Mikami Y, Saito M, Horiuchi I et al. Can biparietal diameter-to-femur length ratio be a useful sonographic marker for screening thanatophoric dysplasia since the first trimester? A literature review of case reports and a retrospective study based on 10,293 routine fetal biometry measurements. Taiwanese Journal of Obstetrics & Gynecology. 2017 Jun;56(3):374-378. PubMed | Google Scholar